mercredi 31 octobre 2012

Buenas tardes amigo



En 1994, les faux frères Ween parlaient l'espagnol comme une vache mexicaine. Un pistolero ayant buté la grammaire, les accords ancestraux partaient en couille et la famille entra alors dans une phrase dangereuse. L'après-midi, qui auparavant était aussi chaud et féminin que la petite sœur était bonne, se mit à l’hombre du soleil couchant. Le soir tomba, maquillé en mec dans une soirée déguisée où l'effroi valait six trouilles, ce qui créait un déséquilibre certain et suffisant pour se casser la gueule. Le lendemain matin fut magnanime, la vengeance n'étant pas un plat servi au petit-déjeuner. Comme c'était un jour de tous seins, tout rentra donc dans l'ordre : l'après-midi et le soir (en espingouin bonnet blanc et blanc bonnet dans le soutif de l'emploi du temps bien rempli) ne tardèrent pas à refaire du genre, son genre à elle, la tarde qui nous fait des avances, les avances de la nuit, de plus en plus pressantes avec le passage à l'heure d'hiver.

vendredi 21 septembre 2012

Le dîner des chiens

(à Kafka, à Perec, à Čapek)

Le temps se traîne en gare, oblitérant le rail, loque aux motifs passés, quand nous voudrions que les minutes se bousculent au portillon, que les secondes voyagent en première. Nous attendons avec appétence et impatience le merveilleux dîner que vous avez l'art et l'habitude de concocter mine de rien mais mine d'or, les doigts dans le nez et les mains dans la farine. Pas un éternuement ne vient troubler la belle ordonnance de cette manipulation anatomiquement absconse. Rien ne met en péril le château de tartes, le fragile équilibre du persil frisottant, le vol-au-vent stabilisé, l'onctueuse purée bloquée depuis sa dernière rotation horaire selon Coriolis et votre sainte spatule, les morceaux de girolles englués dans ce giratoire, les tournedos à point sollicitant votre priorité adroite, a contrario des règles du rond-point pervers. Savantes contorsions culinaires au-delà de notre entendement, démembrements mystérieux, mais que nous goûtons fort et goulûment, tout comme le fruit sans pépins ni incidents qui en découle et roule et coule et déboule en nos palais, titillant nos papilles, pourléchant nos babines, élevant nos lèvres au rang des crocs, étirant nos langues et dévalant les gorges pentues vers nos estomacs estourbis de bonheur, carrément estomaqués. La sidération que provoquent en nous vos épinards tient moins au fer qu'ils contiennent sans le savoir, ces imbéciles ignorants, qu'au savoir-faire que vous développez sans saloper le beurre que vous y mettez, sans négliger la température du haut fourneau de votre haute cuisine. Comment rester cools devant vos babas tandis que nous restons babas devant vos coulis, porteurs croulants sous le fardeau de votre bagage culinaire si élevé qu'il en est himalayesque. Niçoise, piémontaise, grecque, marocaine, russe, peul, indienne, chickasaw, choctaw, mohawk, micmac, macdo, ms-dos, windows, le cosmopolitisme de vos salades nous interpelle, côtoyant la chiffonnade interlope sans jamais y sombrer...rots ! (veuillez pardonner ce renvoi collectif et orchestré, c'est l'effet différé de votre salade mexicaine apopocatépetlyptique). Votre pyramide de steaks saignants est si sanglante que nous apportons nos couteaux aztèques, n'y voyez pas là d'impolitesse mais plutôt une juste appréciation de vos talents remarquables ainsi que l'anticipation raisonnée de votre œuvre à venir. Nous sommes transportés par votre raie au beurre noir de Buenos Aires à Paris. Une dernière danse et des billets de retour sont prévus en cas de déculottée. Votre pain tout frais étoufferait le chrétien pendant la communion, tant il rapproche du divin. Ne vous faites pas du mauvais sang pour nous, nous ne courons aucun risque de ce côté, nous qui pratiquons seulement la religion du réverbère. À ce propos, vous comprendrez pour l'autre fois, quand nous sommes partis pisser sans participer à la vaisselle. C'est que nos vessies se sont prises d'adoration pour les lanternes de votre quartier. En quartiers, entiers, en meule, vos fromages sont si odorants que les bras nous en tombent, les mouches aussi. Votre camembert est si coulant que nos cuisses sentent le fromage, nos pieds aussi. Votre babybel paraffiné est si raffiné, peaufiné et affiné qu'in fine nous gagne tour à tour la confusion des langues. Your puente-l'évêque ist tan bongusta que lo nombramos кардинал. Outra promozione a la sección de produse lactate : der Obersturmbannführer von Livarot is élevé tot de rank van генерал. Nous vous épargnons le commentaire élogieux brait par le dernier d'entre nous au sujet de votre neufchâtel. Une telle phrase d'un sabir empruntant à l'étrusque, au volapük, au mangani et au kobaïen, que vient embrouiller encore un peu plus l'utilisation inconséquente de la grammaire schtroumpf, n'est pas faite pour éclaircir notre propos. L'incident est clos. Votre chocolat fondant dégouline de nos gueules en logorrhées noires, nos compliments tortueux empruntent la même trajectoire. Vous placez la barre si haut, Allah akbar, que vos confitures halals et cachères ne peuvent être données qu'à des cochons. Nous nous accommodons de ce qualificatif sans vergogne aucune. Les juifs et les musulmans, qui se croient au-dessus du panier de Bonne Maman, refusent d'en manger. Pourtant, les mûres préalablement rasées sont abattues selon les rituels pratiqués dans les différentes communautés, il en est de même pour les coings. Attention toutefois, les haricots sont haram, les aubergines à voile (les prunes à éviter) et les pommes vapeur. Vos parfaits ne sont plus perfectibles, pour nous nul consolament, bien que vos éclairs nous illuminent. Vos forêts noires ? Nous en faisons toute une montagne, natürlich ! Vos financiers sont si riches qu'ils pourraient prêter à un taux moins élevé le cholestérol que nous ne leur rendront jamais. Les amandes qu'ils nous somment de payer sont réduites en poudre. C'est là que vos gâteaux deviennent vraiment saisissants. Quant à vos recettes innombrables de petits fours dont nous ne faisons qu'une bouchée, nous pensons à un grand projet d'industrialisation. Quelques problèmes d'organisation subsistent, mais la solution finale devrait offrir au consommateur un choix varié de nos produits qui porteront votre griffe. Pour l'instant tout cela doit rester secret, mais nous pouvons tout de même vous dire que nous ferons faire la garniture et la crème à Thouars. Cette ville du Poitou-Charentes présente de multiples avantages : le pâturage y est tendre, le bétail docile, et le barbelé solide. Un de nos futurs actionnaires du Koweit a récemment visité le site où nous comptons implanter notre unité de production. Il en est ressorti enchanté, l'émir adore. Mais nous sommes au bord de la digression, revenons à vos desserts. Le tonnerre de vos Paris-Brest roule en nos gorges qui l'avalent, le guident habilement, rênes en main, vers nos bas-fonds où ça va continuer de glouglouter, borborygmes de gloutons barbares. L'air de rien, un bar bien garni élève le zinc et honore l'hôtesse, c'est vodka (absolute aéroflotte). Nous apprécions également le glaçon dans ce whisky husky, le Return Of The Distilled Bones Of The Very Very Old And Ancestral Special Grandfather McAbbey Frozen In The Snow Very Very Dark Vador Label On The Rocks Sweet Little 16 Years Old. Vous en reste-t-il un fond de tonneau ? Même ton eau votre eau nous tue, si limpide qu'elle nous liquide. Aussi pure que la colombe, elle roucoule en nous et nous plombe, la palombe. Sans lipides, ni glucides, ni protides, elle nous trucide. Si fraiche, avec une larme d'amour, une pointe de magnésium, un rien de calcium, un soupçon de sodium, un brin de bicarbonates, un nuage de nitrates, un fil de fluor, un poil de potassium et un chouïa de chlorure, qu'elle ne nourrit guère qu'elle nous désespère, bien qu'elle nous désaltère. En outre, die Quelle est la source. Nos reins distillent l'or du Rhin qui traverse notre pays et de l'Ilm qui arrose notre ville dont l'initiale fut tracée dans l'air par l'index de notre grand poète, au-dessus de son lit de mort. Elle y plane toujours, W ou le souvenir de vieillesse, fantomatique sinusoïdale portant de plus en plus de lumière, exécutrice luciférienne accomplissant ainsi la dernière consigne du moribond. Mais nous nous égarons encore, revenons à vos Moutons, à vos Clos, à vos Châteaux. Nous nous gargarisons de vos vins colorés comme si c'étaient les nôtres, mais si nous offrons une modeste bouteille, modeste broutille, nous rougissons de sa qualité stratégiquement moindre qui ne peut absolument pas dévaluer vos merveilles incarnates et vermeilles, sorties d'une vieille cave où des câbles arachnéens relient les millésimes entre des casiers au bois vermoulu. Nous sommes moulus, étant de nature peu robuste, rien qu'à l'idée de gravir le haut plateau d'où provient votre café. Il nous est de fait difficile d'y attraper le sucre, et nous vous sommes reconnaissants de bien vouloir nous en lancer quelques pierres depuis la Bolivie (si nous remuons la queue, ce trait d'esprit en est la principale cause, bien avant la réception de vos sussucres). Votre lait si crémeux, vos crèmes si laitières, votre beurre si onctueux au parfum si herbeux — et nous si verbeux — nous laissent penser que c'est vous la vache. Mais vos œufs au très gros calibre nous détrompent, c'est donc vous l'éléphant la poule abattue hier soir, au très gros calibre, boulevard Henri-IV. Quel manque de pot ! Vous allez nous manquer, parole de ventres ! La police fait ce qu'elle peut pour vous remplacer. Il paraît qu'ils ont cuisiné un suspect qu'on nous servira au dîner, un coiffeur spécialisé dans le chignon qui a tout avoué sans rechigner. Il ne supportait plus votre crête rouge que vous arboriez en gloussant quand vous passiez devant son salon. Il est vrai que, mis à part votre table irréprochable (non, non, non, de ce côté-là rien à redire), pour le reste vous étiez assez insupportable. Mais c'était si bon, si nourrissant chez vous. "C'est une crème, ce merlan" nous a confié l'inspecteur, "Il nous a tout balancé sans qu'on s'énerve, et en prime il nous a débarrassé d'une emmerdeuse de première". C'est très gentil de la part des forces de l'ordre, de nous organiser un dîner de remplacement, maintenant que vous n'êtes plus là. Ils n'ont pas osé cuire votre cadavre. Ce n'est pas plus mal, nous n'aurions pas eu le cœur à vous manger. Mais tout de même, du poisson à la crème, c'est un peu léger pour des braques. C'est que nous étions habitués à plus copieux. Il faudrait que son avocat soit là, c'est bien gras l'avocat. Nous lui réglerions son affaire en trois coups de cuiller à pot de guacamole. Nous irons sans nous illusionner pour voir ce que ça vaudra, qui sera présent, et nous jugerons sur place ce qui pourra être envisagé, ceux qui seront dévisagés, défigurés, déchiquetés, réduits en miettes comme ces canapés fragiles que les bourgeois imprudents laissent à la garde de nos jeunes cousins labradors. Mais nous ne sommes plus des enfants. Nous avons passé l'âge de ronger du Bauhaus à moelle de rotin tressé. 

mardi 24 juillet 2012

Les partants

Nous partîmes par temps froid, Tim et moi, nos manteaux boutonnés par dessus de gros chandails à côtes perlées et à fermeture éclair, raillés jusqu'au cou. Avant même de les enfiler, nous pouffions déjà à la simple idée de ces épaisseurs ridicules qui nous feraient des silhouettes de gros poufs. Mais Hélène nous avait tricoté la maille double avec tant d'amour et de laine, que nous n'osâmes nous fendre, nous plier franchement dans ces effets comiques, riant sous cape en retenant la lame qui ne devait pas dépasser le niveau de nos glottes, précisément là où s'arrêtait la laine, avant que nos éclats fussent hors de portée de ses oreilles à ne pas cribler. La vague, pourtant, risquait à tout moment de se lâcher directement à travers nos côtes incapables d'endiguer bien longtemps le flot de moquerie qui ne manquerait pas de lécher, salivant sous le vent, le lobe vierge de perles de ses portugaises ouvertes sur notre monde, ce qu'elle en connaissait, c'est-à-dire nous et la manifestation de nos sentiments jaillissants et autres éruptions, diverses viscosités de lave et explosions des boutons d'acmé, pavés dans la Mare Nostrum, plouf ! En pleine Mer Égée, son point G. Notre colombe ignorait l'océan athlétique et ne cherchait pas les individus mieux pourvus que nous, pourvu que nous assurassions sa ration quotidienne de plaisir. Hélène se trimbalait un petit poids dans la tête qui la rendait belle, légère et ruineuse. Elle avait le pied grec et jusqu'à l'aine parfumée, jusquiame et fenugrec, des senteurs de décombres qui nous coûtaient chair et nous augmentaient le concombre, à moi et Tim, assez intimes pour se la partager. Nous étions, Tim et moi, fous d'Hélène, en émoi devant elle, derrière aussi. Nous la prenions en sandwich, comprimée, et ça restait entre nous les cornichons, la mayonnaise, la tranche de vie. Cette fois-là, nous la prîmes comme on prend le bus, pour aller ici ou là où elle nous dit de venir, Tim au rez, moi à l'étage, moins timide, ou l'inverse, peu importe. Nous partîmes dans tous les sens, tourniquets d'arrosage tournoyants au-dessus de la pelouse d'Hélène, ce qui restait d'elle, ce boulingrin en friche, en attente de tonte, abandonné par la chercheuse qui nous avait lâchés, pressée de se ruer vers l'orgasme, à l'ouest. Pendant que nous, les garçons moites, moi et Tim, nous retrouvâmes plus intimes encore, nez à nez, corps à corps, face à face, deux tranches de gros pain, ami ami, la garniture envolée, aimant en l’absence, emmental dont il ne resta que les trous dont nous usâmes à travers elle. Hélène revint quelques secondes après nos départs moins précoces et très synchronisés. Nous la croisâmes, Tim et moi, ultime émoi, sur les derniers centimètres de la route défoncée de l'extase, nous saluant depuis l'autre voie, ses menottes s'agitant au rythme des essuie-glaces qui volèrent la vedette au volant complètement lâché. Il avait plu dru, la chaussée était détrempée, nos  véhicules décapotés effectuèrent des tête-à-queue virtuoses, négociant le demi-tour pour rejoindre la voyageuse sur le retour, la baladeuse à l'ampoule vacillante. Nous rentrâmes ensemble à la maison, apaisés pour le moment, détumescents et mous, Tim et moi, Hélène aussi. Le temps se rafraîchit, nous renfilâmes nos épais pulls que l'aventure mouvementée nous avait fait quitter, ayant sué comme des pitbulls pendant la rage. À peine restaurés d'une louche de soupe et d'une douche de soap, nous montrions déjà les dents devant la glace de la salle de bain. Manche en main, nous astiquions, une mise en bouche pour un lendemain éclatant. Nous serions bientôt prêts pour un nouvel appareillage.

samedi 9 juin 2012

Hors d'ici, laisse tomber

Là,
l'âme ?
La mort,
l'amorcer.
La mort, c'est pas une vie.
La vie après la mort, c'est pas une vie.
La vie après la mort, c'est n'importe quoi sauf la vie sauve.
La vie après la mort se sauve et détale comme un lapin.
La vie après la mort ne survit pas après le coup du lapin.
La vie s'est évanouie et ne reprendra plus ses esprits.
La vie après la mort, et puis quoi encore, tu déraisonnes.
La vie après la mort, alors tu n'es plus mort.
Si tu n'es plus mort, ce n'est plus la vie après la mort.
C’est la vie après la vie, pas la vie après la mort,
donc la vie après la mort, c'est mort, c'est cuit.
La vie après la mort, c'est du flan avec des pruneaux.
Ça paraît tendre et puis tu tombes sur un noyau.
Une recette éprouvée dont la valeur est zéro.
Le reset est une remise à zéro, à rien.
Partir de rien est une chimère, où est l'appui ?
Toute galère vient d'un port, la mer est d'accord.
Tout missile est lancé d'une rampe ou d'un puits.
Toute missive a son expéditeur. Ça c'est envoyé !
La mort après la vie, ça oui, c'est comme ça que ça finit.
La mort après la vie, et après ta mort tu revis ?
Alors si oui, c'est la vie après la mort après la vie.
Ça c'est de l'embrouillamini maxi.
Après l'avis pris auprès des morts, c'est pourri,
mais le pourri, ce n'est pas mort, ça moisit, ça vit.
C'est la vie des morts, c'est la vie des bactéries,
comme le roquefort, comme le brebis.
Le corps est recyclé par la petite souris,
paramécies, anaérobies et compagnie.
Mais c'est la vie du corps, pas de l'esprit.
L'esprit est planté, nase dans le décor.
Si tu me lis bien, no stimuli.
L'esprit est cuit sans la soupe, son support.
Tel est l'esprit qui croyait prendre et n'a pas prise.
Un esprit sans corps, c'est comme un trou sans bord.
Un esprit sans corps, ça n'a pas où se raccorder.
Un esprit sans corps, ça se veut branché mais c'est has been.
Un esprit sans corps, ça reste une vue de l'esprit,
une idée d'enfer mais qui ne vaut pas radis.
Pas de fumée sans feus au-dessus des funérariums.
Pas de bulles sans air, sans eau, dans les aquariums.
Pas de bol, des os, rien que des os, rien.
Tibias laids, péronés périmés, désolé.
Fémurs sans futur, os non pérennes, sinon des osselets :
tarse de Paul (l'agneau qui bêla de biais), carpe diem.
Reluque la sèche relique enchâssée, c'est mort.
Remarque l'orque joueur dont l'évent gicle, ça vit.
Mate : yeux absents, orbites vides, c'est mort,
j'en déduis que Martin est peu agile en salle de sciences. 
Cette même salle où l'on sait que l'univers est joueur,
que dans la partie infinie, aucun dé n'est pipé.
Astragales dérivant entre les astres sans dessein.
Fais-je du matérialisme burlesque ou suis-je un âne ?
Nous sommes les enfants du néant et d'une peau de banane,
tarzans miteux, hercules foireux, puces et nanosecondes, 
des atomes dans un barreau de l'échelle du temps.
Seul rien dure toujours, rien d'autre n'est éternel.
Axiome : xy/0 = ∞, le rien nous sépare pour toujours, à jamais.
Seule façon de concevoir l'infini, le rien, rien que le rien.
Je te dis tu à toi, x qui n'existes plus, c'est crétin ce ping, c'est terrien.
Je teste ma connexion, ne t'en fais pas, ce n'est rien.
Souvent, la poésie que je malaxe ne rime à rien.
L'alexandrin, furax, est rongé par le vers,
exit la césure, les hémistiches couchent entre eux.
Mais je dévie de l'axe fixé : expliquer la mort.
Enfin bref, l'éternité vécue, ça n'a ni queue ni tête,
c'est comme une crevette décortiquée.
Une idée qui, pourtant, s'incruste assez dans les têtes.
Cette idée-là, décortiquée, ne vaut pas tripette,
ne vaut pas cacahouète, ne vaut pas pet de lapin.
Chikhai, chonyid et sidpa bardos, non merci !
Qui voudrait se réincarner en bébé phoque ?
Pas moi, pas toi, pas même Brigitte, trop risqué.
Pas de Jugement Dernier, pas de Champs Élysées, pas s'en faire.
Pas de Walhalla, tralala lalère, pas sans fer.
Pas de Ragnarök, pas de cidre dans la bière.
Pas de Normands rouant de quatre fers.
Pas de quand, rien que halva d'os (truc turc) pour les vers.
Pas le havre de paix, pas de houris après la guerre.
Pâle cadavre, une mine d'or pour les petits.
Les p'tits nains qui forent dans la Schneewittchen flétrie,
des galeries, un carrefour, une boucherie, Mac dodo.
Je me creuse l'esprit pour planter le décor.
Un quartier qui vit,
une boîte de nuit.
Tombe la nuit,
une boîte.
Nuit.
Nu.

jeudi 17 mai 2012

Buck in Furs (merci à lazarus pit music)




le voyage vers ici tient à remercier lazarus pit music pour cet échange de liens très bondage, un sacré bond d'âge, un saut par-dessus l'anorak anorexique aussi maigre que les ficelles qui le maintiennent bien tendu d'un bord à l'autre du gouffre des générations. En 1967, tu n'étais pas né, mon fils, et Buck 65 non plus. Moi, j'avais 9 ans, j'étais trop jeune pour apprécier le Velvet Underground que n'écoutait pas mon père qui avait 45 ans et préférait André Verchuren, le con, mais c'était son droit. Le seul grand-père que j'ai connu n'aimait pas la musique, ça lui agressait les oreilles. Il ne lisait que l'Almanach Vermot et le Courrier de la Mayenne, ce qui laisse présumer qu'il n'aurait pas plus apprécié la Venus im Pelz de ce passionnant dégénéré vicelard de Leopold von Sacher-Masoch. Pour autant, je ne peux pas dire que mes ancêtres aient loupé beaucoup de trains en marche puisqu'ils ne sont jamais entrés dans les bonnes gares. Aujourd'hui, j'essaie modestement de ne pas commettre les mêmes crimes d'ignorance crasse qui entacheraient mon pardessus grand ouvert devant les maternelles du savoir. Je me tiens au courant, parfois survolté. Je me tiens aussi à la main courante quand je faiblis dans l'escalier de ton blog, quand la marche est trop haute et que je lève le pied alors que je devrais mieux lever le pied. Comme tu le vois, rien n'est simple dans cette affaire de degrés, de forces, de mise à niveau. J'évite aussi les leurres, les attrape-nigauds, les pièges culturels que sont les passages à niveau où les trains passent si vite qu'on finirait déchiqueté sur la voie à vouloir les attraper, entraîné sur des centaines de faux maîtres. Aussi, je m'entraîne à les reconnaître ceux-là, et à connaître les vrais, pas l'ivraie mais l'ivresse du pur grain, du gratin, et je progresse, je progresse...

lundi 2 janvier 2012

Treize à la douzaine

0122 : Aulus Platorius Nepos, gouverneur de la Bretagne romaine, est chargé de la construction du mur d'Hadrien marquant la limite septentrionale de l'Empire Romain. Sous le prétexte de contenir les Pictes, il empêche en fait l'accès vers le sud aux tribus de Néandertaliens.
0212 : Fondation sous la Calédonie du Royaume des Grottes du Mammouth par Ur-Oorrk qui se proclame empereur souterrain des Néandertaliens, après la mort de son rival Ur-Aarghh.
0221 : Les Néandertaliens, ayant creusé jusqu'à la Manche et n'aimant pas l'eau, renoncent à l'Europe. Ur-Oorrk propose d'étendre le réseau de galeries sous la future Angleterre.
1022 : Knut le Grand lance une expédition secrète sous l'Angleterre contre les Néandertaliens affaiblis. Il assiège et fait inonder les Grandes Cavernes, croyant ainsi anéantir les derniers représentants de l'espèce.
1202 : Arthur Ier et sa sœur sont faits prisonniers à Mirebeau par un seigneur normand à la solde de Jean sans Terre. Parmi la domesticité du duc de Bretagne, on découvre une famille fort laide et excessivement trapue.
1220 : La dernière famille de Néandertaliens s'installe à Locmariaquer, faisant profil bas pendant des siècles.
2021 : Le transgenre Marin Le Pen, empereur de la France Élargie et leader du Front Écologique Européen, ordonne l'internement des derniers amateurs de fioul dans les camps du Frioul. Les accros au gaz sont dirigés à leur tour vers les centres de tri sélectif de Graz en Styrie.
2102 : Le président mondial Google LXVII refuse la dernière mise à jour. La noosphère plante côté jardin et 45 milliards de consciences-bulbes sont effacées. Parmi les disparus, on dénombre le pape virtuel Pie III,XV qui venait tout juste de se faire arrondir à la décimale supérieure.
2120 : Restructuration complète des dernières consciences à taux organique dominant. La viande et les os sont proposés aux exocarnivores cynomorphes de Pluton contre la restitution des sondes Voyager et des baballes.
2201 : Première incursion des Massacreurs Creux par les minis trous noirs du Galaxy-Golf d'Andromède. Janvier, Avril et le Lundi de Pentecôte sont engloutis.
2210 : Évacuation de l'année entière vers 2210 bis par mesure de sécurité. Le transfert échoue. Des débris menstruels réapparaissent en 2012, semant la panique parmi la population locale en déréglant les horaires des trains et les hormones sexuelles.